Une pratique réflexive de la recherche créative.
La méthodologie du travail artistique de La Luna évolue toujours de manière itérative, entre pratique et théorie, entre faire et penser le faire. Dans le processus de recherche, chaque étape est une avancée, traversée de doutes, au plus proche de ce que l’on ressent, au plus près de ce que l’on pense au moment où la chose se réalise. C’est à la fois un pari et une gageure.
La Luna inscrit sa recherche-création dans les axes de réflexion suivants : Anthropologie, Art et Espace public / Art, Politique, Environnement / Esthétique des savoirs spatiaux et vitaux
Une approche expérimentale : découvrir, tester, rechercher et trouver en faisant.
Faire confiance aux méthodes empiriques de la connaissance (intuition, bricolage, manipulation, mise à l’épreuve). Donner forme tangible et matérialité concrète à ses idées. L’ambition de lier recherche fondamentale et pratique expérimentale, permet de dessiner la possible participation sensible de chacun à l’intelligibilité du monde commun. En effet, l’activité de recherche théorique anticipe les instances du travail pratique et en font parties intégrantes. Cette manière de chercher et de fabriquer des formes artistiques expérimentales, remet en cause symboliquement et concrètement l’idée de la séparation des activités, entre ceux qui pensent et décident (concepteurs) et ceux qui sont voués aux travaux matériels et manuels (fabricants). Le travail artistique ainsi conçu, permet de donner à voir et de mettre en scène « la main qui pense », rendant visible et tangible la dialectique entre pensée et matière.
« Une projection puissante prend place dans l’acte créatif : la constitution mentale et le corps entier du créateur deviennent le lieu du travail » (Juhani Palasmaa, La main qui pense, pour une architecture sensible, 2009 , réédition 2013)
La Luna construit son projet de recherche-création autour d’une exploration des espaces-temps contemporains à vivre en commun, au défi d’un présent en perpétuelle mutation, questionnant notre engagement concret face au réel, tentant de dessiner les contours de nouvelles formes d’urbanité.
Une approche écosophique* de la pratique de l’art.
Les choix d’écritures et de langages plastiques de La Luna s’articulent toujours à des questions éthiques, sociales et politiques. La pratique de l’art dans cette perspective réflexive instaure d’autres manières de faire, mettant en place des instances et des dispositifs à la fois analytiques et producteurs de subjectivité, allant dans le sens d’une re-singularisation, individuelle et/ou collective.
L’écosophie* (Félix Guattari, 1989) est une articulation éthico-politique des trois registres écologiques, celui de la prise en considération des facteurs qui menacent l’équilibre de l’environnement naturel (écologie environnementale), celui des rapports sociaux (écologie sociale) et celui de la production des subjectivités humaines et individualisées (écologie mentale). Cette sensibilité transversale permet de faire émerger de nouvelles propositions formelles et poétiques, respectueuses des éco-systèmes vitaux. Il n’y a pas d’opposition entre les trois écologies : environnementale, sociale et mentale. Elles permettent, de façon complémentaire, de penser des lignes de recomposition des praxis humaines, de développer une autre économie du temps, une autre répartition des espaces de travail, de créativité et de socialités, de réorienter la production des biens matériels et immatériels en tant que micro-domaines de sensibilité, d’intelligence et de désir, de faire émerger l’expression de nouveaux « Territoires existentiels » qui tendent à modifier et à réinventer des façons d’être au monde.
« De nouvelles bourses de valeur, de nouvelles délibérations collectives donnant leur chance aux entreprises les plus individuelles, les plus singulières, les plus dissensuelles sont appelées à voir le jour (…) la notion d’intérêt collectif devrait être élargie à des entreprises qui, à court terme, ne profitent à personne, mais qui, à long terme, sont porteuses d’enrichissement processuel pour l’ensemble de l’humanité. C’est l’ensemble de l’avenir de la recherche fondamentale et de l’art qui se trouve ici mis en cause » (Félix GUATTARI, Les trois écologies, Paris, Galilée, 1989, p.67)